amitié

Un déluge psychédélique

Par Le 01/11/2019

Un déluge psychédélique

 

Les lumières s’épousent avec une chaleur torride, sachez-le ! Les néons impénétrables scintillent dans l’atmosphère chargée de vapeur tandis qu’un foisonnement de rayons hypersoniques s’entrechoquent à l’infini. Des vautours survoltés occupent l’espace sans fin sous le regard de gentlemen corpulents agrippés à une muraille de verre cristallisée. Un tempo galvanisant emporte dans son élan les habitants de cette portion d’éternité inapprivoisée. Edmond pourrait tenter d’instaurer un ordre non moins vivifiant grâce à son charme mortel, en se fiant aux conseils des harpies enivrées qui logent dans la bordure de cette galaxie si plaisante. Ce digne garçon sait ce qu’il lui importe de raconter, il se fabrique des récits imprévus dans un secteur de son esprit qui se soustrait aux prétentions des observateurs vaniteux. Il n’est plus nécessaire de cultiver sa foi en une quelconque réussite ; il n’y a plus lieu de se fixer des objectifs trempant dans un réalisme cru. Les pieds d’Edmond réclament leur droit à l’épanouissement en cette soirée festive - les voilà donc, s’emparant de leur liberté comme des éclats de Marianne, s’initiant à des rituels méconnus et s’engageant sur la piste d’une spiritualité majestueuse.

 

Edmond secoue les membres de son corps avec frénésie aux côtés de poulpes succulents, ses longs cheveux s’embrasent pour révéler son crâne d’érudit tonitruant… Les secrets s’envolent dans l’assiette du voisin simiesque, les confidences sont négociées sur le marché des valeurs les plus stupéfiantes, les souvenirs misérables ou grandiloquents sont diffusés sur un écran massif devant lequel se coagulent des Plutoniens tricéphaux avec de longues antennes. Il n’est pas recommandé de leur adresser la parole, hormis si vous disposez d’un câble d’alimentation plus solide qu’une forteresse médiévale. Edmond continue ses pérégrinations inépuisables, ses muscles pouffent, ses oreilles sifflent, ses bras spéculent avec des épicuriens circonspects. Abriter la vie, c’est railler la mort. Edmond, ne lui en voulez pas, ne connait toutefois ni l’une, ni l’autre. Je ne sais pas sûr qu’il me reconnaîtrait davantage. Eh, pourtant, on tentait de le dissuader de s’introduire comme un lapereau innocent dans la gueule du loup. Flottant entre les crocs de cet animal sérieux, on voulait le reconduire à la maison, on souhaitait lui montrer un chemin plus conforme aux vœux d’un personnage civilisé.

 

On ne le sait pourquoi, on ne le voit sous aucun angle possible, on ne le sent pas davantage ! Edmond est entêté dans son excellente folie, il célèbre avec extase sa migration vers les bras de la démence riante. Il m’a suggéré de l’accompagner dans sa discothèque olympique - il ne saurait admettre que je ne cautionne pas sa radieuse toxine. Quel somptueux bravache ! Quel fanfaron luxueux ! Quel succulent bélître ! Partageux dans ses frasques, altruiste dans son inconséquence, humaniste dans ses scarifications, Edmond est un éclat de toile céleste enfermé dans un corps trop fin - la vie remue en lui, des existences bigarrées se déchaînent dans son enveloppe corporelle, des parasites étincelants se bousculent sous sa peau lactescente. Mais, finalement, dis-moi… Edmond, où te trouves-tu ? Où t’es-tu réfugié pendant ces indéchiffrables mêlées ? Où navigues-tu pour fuir la tempête de ces échauffourées éblouissantes ? Si je pouvais te retrouver sur une île déserte, une grange abandonnée, ou un vestibule crasseux…

 

Ne serait-ce pas sublime, hein ?

 

 

(D.U., juin 2019).